La chronique philo de Cynthia Fleury. Crise personnelle et nationale

Le début d’année s’ouvrait sur la radio publique France Culture par une série de reportages de Karine Le Loët, intitulée l’Effondrement et moi, consacrée aux traversées personnelles et publiques de cet épisode du Covid-19, et plus généralement à ces expériences d’effondrement, systémique, écologique et/ou psychique. Qu’est-ce qui se transforme chez les sujets et dans les sociétés, comment s’adapter aux bouleversements globaux ? Jared Diamond, qui a grandement contribué à la popularité du terme « effondrement », choisit un autre terme pour son nouvel opus d’avant la crise planétaire (2019) et signe, dans Bouleversement. Les nations face aux crises et au changement (Gallimard, 2020), une analyse afin de déterminer une douzaine de facteurs, issus de la résilience des crises personnelles et partiellement ou non transposés aux crises nationales. Selon l’auteur, il faut reconnaître qu’on traverse une crise, sortir donc du déni, obtenir de l’aide matérielle et émotionnelle de la part d’autres individus ou d’un groupe, s’inspirer des modèles que représentent d’autres personnes pour résoudre des problèmes, faire preuve de « la force du moi », procéder à une autoévaluation honnête, avoir l’expérience des crises personnelles antérieures, faire preuve de patience et de flexibilité, posséder des valeurs fondamentales individuelles et si possible bénéficier d’une situation où les contraintes personnelles sont moindres. Dans sa traduction politique, la douzaine de facteurs prend l’allure suivante : partir d’un consensus national sur le fait que son pays traverse une crise, reconnaître qu’il est de la responsabilité de la nation d’agir, construire une clôture afin de circonscrire les problèmes nationaux à résoudre, obtenir de l’aide matérielle et financière de la part d’autres nations, s’inspirer des modèles que représentent d’autres pays pour résoudre des problèmes, pratiquer l’autoévaluation honnête, avoir une expérience historique en matière de crises nationales antérieures, savoir faire face à l’échec national et faire preuve de flexibilité nationale en fonction des situations, posséder des valeurs nationales fondamentales, et enfin bénéficier d’absence de contraintes fortes géopolitiques. L’autre grand mot-clé de Diamond est celui de « changement sélectif », car, dans une crise, tout n’a pas à être modifié, bien au contraire : le discernement est donc essentiel pour traverser et dépasser la crise. Parmi les 216 nations existantes, Diamond en étudie 7 parce qu’elles sont liées à son histoire personnelle et qu’elles ont une valeur d’enseignement spécifique : la Finlande, le Japon, le Chili, l’Indonésie, l’Allemagne, l’Australie et les États-Unis. Et Diamond de conclure, dans un après-propos : « Il nous faut dès maintenant réfléchir au prochain virus. »

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