Le genre et le sexe de la performance sportive: un bouleversement des catégories ?

Le genre et le sexe de la performance sportive : un bouleversement des catégories ? (22-SEM-01)

Porteurs

  • Anaïs BOHUON (Université Paris-Saclay, Laboratoire CIAMS (Complexité, Innovation Activités Motrices et Sportives))
  • Matthieu QUIDU (Université Claude Bernard Lyon 1, Laboratoire L-VIS)
  • Anne SCHMITT (Université Paris-Saclay, Laboratoire CIAMS)

Résumé

Dans le monde sportif, catégoriser les corps apparaît comme une évidence. L’égalité sur la ligne de départ doit permettre aux meilleur.es de gagner. Cette égalité est protégée par de nombreux codes et chartes où les sportif.ve.s sont sélectionné.es et autorisé.es à s’affronter au sein de sous-groupes structurés en fonction de divers critères : la performance, les différents types de handicap, l’âge, le poids, le sexe. Ce principe de catégorisation, comme régulation en amont des « avantages physiques », répond au principe de la garantie d’une incertitude du résultat au fondement de toutes compétitions. Cependant, les catégorisations sportives ne peuvent être isolées des rapports de pouvoir et des contextes socio-historiques au sein desquels elles sont générées, maintenues et légitimées. Les classifications s’étant progressivement établies en termes de durée des épreuves, de distance, de mesure de la performance, de poids, de sexe des athlètes, n’ont jamais pu être unanimement fondées scientifiquement et sont plutôt l’effet de débats, de polémiques voire de conflits autour de la définition même de la compétition sportive. Tous les dispositifs normatifs sportifs comme la médecine, la biologie, la physiologie, les médias, l’école ou les instances sportives elles-mêmes, visent non pas à vérifier les catégories dans lesquelles la performance sportive est mesurée, objectivée et donc légitimée, mais bien à reproduire idéologiquement une catégorisation discriminante (principalement sexuelle) (à commencer par les femmes, les personnes en situation de « handicap », c’est-à-dire, les corps hors normes) – à les laisser dans un en dehors des privilèges de la virilité (aux fondements de l’histoire du sport).  En somme, il s’est agi d’élucider l’émergence et l’élaboration de ces catégories qui, en prenant le corps pour cible et objet, produisent des sujets « normés ». Ainsi, les athlètes femmes jugées trop performantes et masculines comme Caster Semenya ou Annet Negesa, sont exclues des compétitions olympiques d’athlétisme, leurs corps produisant naturellement « trop » de testostérone pour les institutions sportives, ce qui briserait cette égalité des chances dans la catégorie dite « dame ». Une normalisation des corps qui se poursuit lorsque les performances d’Oscar Pistorius, athlète paralympique, rivalisent avec celles des athlètes valides, ses prothèses éveillant les soupçons d’un avantage technologique entraînant une concurrence déloyale. Dès lors, les frontières de ces catégories sont instables, mouvantes, en perpétuelles crises traduisant les enjeux sociaux, politiques, idéologiques, économiques dont elles font l’objet. Tout l’enjeu de ce séminaire était de montrer comment ces catégories corporelles se révèlent être politiques et au cœur des rapports de pouvoir. Les corps en mouvement, au prisme du genre dans une perspective intersectionnelle, ont ainsi été le fil rouge de ce séminaire.

(Mise à jour le 24 juin 2024)

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