Workshop « Designer pour l’aérospatiale aujourd’hui »
Formaliser, Expérimenter, Explorer.
Journées d’étude organisées par le Centre de recherche en design (ENSCI-Les Ateliers / ENS Paris-Saclay)
Avec le soutien de la Maison des Sciences de l’Homme Paris-Saclay
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La participation du designer et/ou de l’architecte au développement
du secteur de l’aérospatial n’est pas nouvelle. Déjà en 1972, le
designer français Raymond Loewy réalisait des études dessinées
d’habitables pour le projet de mission spatiale Saturn Five Space
Station de la National Aeronautics Space Administration 1 (NASA).
Aujourd’hui, certains designers spécialisés dans la conception
d’interfaces homme-machine sont intégrés au sein des agences spatiales
et participent en amont à la conception des outils numériques qui
permettent d’opérer les équipements embarqués à bord des vaisseaux,
robots ou tout autre équipement technique et scientifique à destination
de l’espace ; c’est le cas du groupe de recherche Human Interfaces Group
de la NASA. Ce travail autour de la conception des habitacles et
équipements servant la perspective d’une vie embarquée, se poursuit
aujourd’hui, potentiellement enrichi de la collaboration de nouveaux
acteurs biologistes, ergonomes, psychologues ou encore sociologues, dont
l’importance des recherches sur la vie en ces espaces contraints, est à
présent largement reconnue.
Ce rôle « historique » du designer et/ou architecte, participant de
l’aménagement des habitacles et de leur fourniture en équipements, n’est
pourtant pas celui que nous entendons considérer lors de ces journées
d’étude. En effet, l’organisation de ces dernières est bien plutôt
motivée par le constat que le designer se trouve aujourd’hui appelé à
participer nouvellement de la conception de ces projets de mission
spatiale, en intervenant sur des phases de projet situées plus en amont,
et au demeurant pour des missions qui excèdent souvent la question du
vol habité. Le designer ou l’architecte tend en effet à endosser de
nouveaux rôles dans le développement des projets de mission spatiale
innovants – des rôles qui, pour être variés, ont en commun de ne plus
cantonner son travail au seul terme applicatif du développement de ces
projets de mission. Ainsi le designer peut par exemple être amené à
accompagner la conception d’un satellite à visée d’exploration
scientifique, et se trouver à interagir avec d’autres acteurs, en
fréquentant les laboratoires scientifiques et non plus seulement les
bureaux d’étude. De manière générale, nous faisons l’hypothèse que ce
qui se joue ici pour le design et/ou l’architecture (ces disciplines du
projet, dont les frontières se trouvent elles-mêmes déplacées sinon
défaites, dès lors qu’il s’agit de travailler en pareil contexte
extra-terrestre, coupés du sol, à l’appréhension de nouvelles échelles
d’expérience), c’est un renouvellement décisif de ce qu’il/elle «
fabrique » : non plus tant des espaces susceptibles de répondre à la
problématique des espaces contraints, ou des équipements faisant preuve
d’une ergonomie optimale, mais de nouveaux outils de représentation
et/ou scénarisation pour de possibles expérimentation et/ou expériences
de l’échelle cosmique.
Ces nouvelles modalités d’intervention l’obligent à réinventer ses
propres modes de formalisation, d’expérimentation ou d’exploration –
trois opérations profondément inscrites dans la pratique du design et de
l’architecture, mais qui sont à redéfinir en profondeur en ces nouveaux
contextes : qu’il s’agisse de participer plus en amont à la
construction des outils de représentation/expérimentation/exploration de
la connaissance scientifique mobilisée par ces missions ; de viser la
production d’imaginaires qui ne soient plus réductibles à la seule
production d’une imagerie ou d’une esthétique devant servir la
réception/communication en aval de ces missions, mais puissent ouvrir à
des expériences alternatives concrètes de l’échelle cosmique ; de
participer de la réorientation des anticipations à la source des choix
de programmation mêmes de ces missions ; ainsi l’architecte Olivier
Walter interrogeait récemment les possibilités de la vie sur Mars en
faisant du biomimétisme une source de conception potentielle pour la
réalisation d’une architecture pour une colonie martienne.
A l’horizon de ces journées, la volonté d’éprouver la réalité, la
pertinence et les obstacles qui se présentent, pour un tel
renouvellement de la relation du designer/architecte au secteur de
l’aérospatiale : depuis la conception d’espaces contraints et
d’équipements micro, vers une activité de formalisation,
d’expérimentation et d’exploration renouvelée. Un déplacement d’autant
plus en prise avec les besoins de cette recherche aérospatiale qu’il
permet de dépasser les difficultés de cette dernière à appréhender
l’échelle cosmique, en travaillant à l’articulation possible d’échelles
de réalité hétérogènes en une véritable expérience possible, consistante
et significative.